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Le modèle finlandais

Paul Robert, "La Finlande : un modèle éducatif pour la France ? - Les secrets de la réussite. ESF éditeur, 2010.

 

Ceci est un résumé, une fiche de lecture qui tente de reprendre l'essentiel d'un livre qui compte environ 150 pages.

 

I - La Finlande et PISA

 

PISA est un programme internatinal pour le suivi des acquis des élèves conçu par des experts de l'OCDE pour évaluer les performances des systèmes éducatifs. Les domaines de connaissances évalués sont la lecture, les maths, les sciences et la résolution de problème. L'objectif est de mesurer la capacité des jeunes à faire face aux défis de la vie réelle. PISA s'intéresse aussi aux attitudes des élèves vis à vis des apprentissages et à leur contexte socio-culturel.

En Finlande on trouve une proportion plus élevée qu'ailleurs d'élèves atteignant un bon niveau de performance, la disparité des performances entre élèves est beaucoup moins grande, on trouve une très faible proportion d'élèves dans le bas de l'échelle et une exceptionnelle capacité à corriger les effets des inégalités sociales. Les élèves en très grande difficulté sont moins nombreux qu'ailleurs. La variation des résultats entre établissements est la plus faible de tous les pays de l'OCDE. L'impact du statut professionnel des parents sur le résultat des élèves est jusqu'à 2 fois plus important en France qu'en Finlande. Pourtant, la Finlande consacre moins de moyens à l'éducation que nombre de pays qui réussissent moins bien qu'elle.

 

II - Le système éducatif finlandais : performance et équité

 

 L'obligation scolaire cours de 7 à 16 ans mais l'école peut commencer entre 6 et 8 ans selon les dispositions de l'enfant. la Finlande ne s'est pas associée au courant en faveur d'une scolarisation de plus en plus précoce des enfants mais a mis en place un enseignement préprimaire facultatif pour les élèves de 6 ans. 

Au cours de la scolarité obligatoire, tous les élèves bénéficient d'un enseignement fondamental unifié basé sur un même programme défini nationalement. Toute forme de sélection ou de filière a été abolie. Les élèves sont regroupés dans des classes hétérogènes.

La Finlande a fait de la gratuité de l'éducation un principe absolu, les enfants ont droit à un repas quotidien complet gratuit, livres et matériel scolaire sont fournis gratuitement dans un soucis de compenser les inégalités familiales.

finlande.jpgP. 29.

 

Dès 1 an, les enfants peuvent être accueillis au jardin d'enfant géré par les municipalités. A 6 ans ils peuvent entrer dans une année d'éducation préscolaire, transition entre le jardin d'enfant et l'école. 96% des enfants sont inscrits dans une classe préprimaire.

La période de l'école fondamentale obligatoire regroupe l'équivalent de notre école primaire (classes 1 à 6 pour les enfants de 7 à 13 ans) avec des professeurs polyvalents et notre collège (classes 7 à 9 pour les élèves de 13 à 16 ans) avec des professeurs spécialisés dans 1 ou 2 matières. La Finlande a tendance à regrouper les deux stades de l'éducation fondamentale dans des établissements uniques.

Les redoublements sont presque inexistants. Au cours des 6 premières années de l'école fondamentale, les élèves ont de 19 à 24 séquences hebdomadaire d'enseignement (45 minutes de cours, 15 minutes de pause, pause repas courte de 1/2 heure, fin de l'école à 14h environ).

A partir de 13 ans tous les élèves accèdent à l'école secondaire inférieure sur 3 ans avec 30 séquences de cours/semaines, 6 par jour  ce qui fait 23h30 effectives de cours, une des charge horaire les plus basses des pays développés. Le travail hebdomadaire à la maison est estimé à 5h, un des plus bas d'Europe (En moyenne 8h/semaine en France). Les élèves finlandais de 15 ans sont ceux qui passent le moins de temps en cours et dont la charge de travail en dehors de l'école est la plus légère. Entre 7 et 15 ans, l'écolier français reçoit environ 2000 heures de cours de plus que son camarade finlandais.

Un conseiller d'orientation pour 200 élèves à partir de la classe 7 (13 ans), des séances de conseil intégrées à l'emploi du temps, les élèves ont deux rendez-vous individuels par an avec le conseiller.

Une 10ème année peut venir s'ajouter aux 9 de l'école fondamentale obligatoire : 3% des élèves ont recours à ce dispositif de seconde chance, à l'issu de cette année, la plupart se dirigent vers l'enseignement professionnel. Pas d'examen à la fin de l'école fondamentale. Après, 55% des élèves vont vers des études générales, 37% vers des études professionelles.

Au lycée général, la classe n'existe plus, les élèves élaborent leur programme de cours pour chaque période de 6 semaines et forment selon les cours des groupes de taille et composition variées.

En France, un jeune sur 6 sort du système scolaire sans diplome du secondaire, seuls 3% sont dans ce cas en Finlande. Le taux d'accès à l'enseignement supérieur est de 71%, 48,5% d'une classe d'âge obtient un diplome du supérieur long.

Les municipalités jouent un rôle de premier plan : des bureaux municipaux de l'éducation supervisent les jardins d'enfant, l'éducation fondamentale et préscolaire, l'éducation spécialisée, les transports, la restauration scolaire, les services de santé, d'assistance sociale et de psychologie scolaire. Elles gèrent la plupart des lycées généraux. Elles ont une autonomie totale pour déterminer les effectifs des classes, pour décider des créations d'écoles fondamentales ou de lycées, pour recruter les enseignants et financer les établissements scolaires. De plus, elles ont une grande latitude pour adapter les grilles horaires et les programmes nationaux. Le financement de l'éducation est donc assuré conjointement par l'état et les municipalités.

Les établissements privés sont financés sur le même principe que les publics mais ils sont peu nombreux en Finlande, 3% des écoles fondamentales, 7% des lycées et 16% des lycées professionnels.

La Finlande concentre son effort financier sur l'éducation fondamentale et particulièrement sur le premier cycle du secondaire (notre collège) et sur l'enseignement supérieur alors qu'en France c'est le lycée qui mobilise la dépense par élève la plus forte.

 

III - Une longue suite de réformes

En 1966 la coalition de gauche au pouvoir souhaite transformer un système inégalitaire en un système unifié identique pour tous jusqu'à 16 ans (l'école fondamentale).

 

IV - Les clés du succès

 Un environnement d'apprentissage sécurisant, des profs attentifs et soucieux de créer des liens affectifs et chaleureux avec leurs élèves et de développer chez eux une saine estime d'eux même sont les bases à l'acquisition des savoirs. Approche holistique de l'éducation : approche globalisante qui s'intéresse à son objet comme constituant un tout.

La Finlande a retenu les théories qui rendent l'enfant acteur dans l'acquisition de ses savoirs et compétences. Approche constructiviste, stimuler l'activité de l'enfant en lui proposant des situations aussi diverses que possible qui vont lui permettre de construire un savoir nouveau plus élaboré, plus étendu et riche de sens. Les interactions entre élèves ne sont pas moins importantes que la relation duelle prof-élève.

Une augmentation du niveau d'anxiété entraîne systématiquement une baisse significative des résultats. L'élève doit se sentir à l'école comme chez lui, c'est un lieu de vie où les espaces sont vastes (65 m²/classe) et où de confortables endroits sont prévus pour le repos. Les parents sont considérés comme des partenaires éducatifs. la taille modeste des établissements crée une atmosphère de proximité et permet au principal ou proviseur de connaître personnellement les élèves. Le tutoiement envers le professeur est habituel, en fin de journée les élèves partent en serrant la main à leur prof quand ils ne lui font pas la bise. Décontraction y compris vestimentaire, liberté de mouvement des élèves allant de pair avec une surprenante auto discipline. En cours les profs ont un seuil de tolérance élevé par rapport à de petits écarts qui entraînent souvent en France des sanctions immédiates.

Absence de vie scolaire et de surveillants, les heures de colle sont sous la surveillance des profs.

Faible taille des effectifs à tous les niveaux d'enseignement : environ 20 élèves en moyenne. les élèves à besoins particuliers sont regroupés dans des classes ne dépassant jamais 10 élèves. Des assistants d'éducation n'ayant pas de rôle particulier de surveillance viennent apporter leur aide aux profs dans la classe.

Absence de corps d'inspection, décentralisation poussée et suppression presque totale des redoublements dégagent des moyens affectés à l'aide individualisée.

Pas de cours magistral, élèves constamment en activité, seuls ou en groupe. Le prof, une ressource parmi d'autres.

Jusqu'à 12 ans, les élèves ne sont en général pas notés, les textes officiels encouragent la pratique de l'auto-évaluation. Les notes chiffrées apparaissent à partir des classes 6 ou 7, elles peuvent aller de 4 à 10, on a proscrit le 0 infamant, avec 4 l'élève ne sait pas. Entre 5 et 9 la connaissance est acquise mais avec différents niveaux de perfection. A l'issue de l'éducation fondamentale, les notes servent de base pour la sélection à l'entrée dans les lycées généraux ou professionnels. Soucis de valoriser ce qui est su plutôt que souligner ce qui ne l'est pas.

L'école est au centre d'un réseau impliquant tous les personnels de l'éducation et les services sociaux et de santé sans aucune frontière étanche entre les missions des uns et des autres, coopération étroite en lien avec la famille.

Concernant la remédiation, les séances d'aide se déroulent soit avant soit après la classe soit au sein même de la classe. Le travail en groupe favorise la disponibilité du prof pour ceux qui en ont le plus besoin, les autres travaillant en autonomie.

Chaque école en Finlande a son RASED à demeure, les profs spécialisés présents dans les écoles (1/100 élèves environ) peuvent intervenir dans la classe aux côtés du prof habituel ou prendre en charge les élèves par groupe de 5 au maximum pendant une partie de leur emploi du temps. Les enseignants spécialisés n'hésitent pas à se mettre sur un pied d'égalité avec l'élève : posture du maître ignorant parfois plus efficace que celle du maître érudit omniscient. Un plan individuel d'éducation est établi en collaboration avec la famille, précisant la nature des difficultés et les matières pour lesquelles un enseignement adapté est mis en place. Au total, c'est presque 1/3 des élèves qui, à des degrés divers, reçoivent des aides spécifiques. Détection très précoce des troubles d'apprentissage, la 1/2 des élèves détectés réintègrent un cursus normal à partir de la classe 4 (10 ans). En Finlande, 30% des élèves rentrent dans la catégorie des élèves aux besoins éducatifs spéciaux, 10 fois plus qu'en France.

Le prof doit être un facilitateur d'apprentissage rogérien (Carl Rogers, "Liberté pour apprendre", DUNOD 1984) avec la création d'une ambiance de confiance ou de sécurité psychologique; un pédagogue constructiviste : partir des conceptions du monde de l'apprenant pour pouvoir le faire entrer dans les apprentissages, un nouveau concept ne pouvant être pleinement intégré qu'à condition d'avoir été élaboré par l'élève; un directeur de conscience humaniste. La formation initiale des profs est de haut niveau, la pédagogie y tient une place fondamentale. En Finlande, la formation pédagogique représente environ 50% du programme des 5 années de cursus menant au master.

 

V - Quelles leçons tirer du modèle finlandais ?

 

Accepter le risque d'une relation moins hiérarchisée où le maître assume son rôle de facilitateur, d'instigateur et de stimulateur ne supprime pas l'autorité.

Un élève devrait pouvoir exprimer qu'il ne comprend pas un cours, qu'il s'y ennuie ou n'en voit pas l'intérêt sans risquer de représailles.

L'éducation est un processus d'acculturation, la tâche est largement facilitée quand les modèles et les représentations qui ont cours dans l'environnement familial de l'élève sont proches de ceux de l'école. Il faut faire entrer dans la culture scolaire avec ses codes, ses valeurs, son langage, des élèves qui n'y sont pas préparés par leur milieu.

L'autonomie et l'esprit d'initiative prônés par le socle commun sont d'excellents antidotes à la disparition progressive de l'envie d'apprendre. Avec les notes, les élèves français ont été dressés par un système compétitif et sélectif à se comparer aux autres au lieu de se centrer sur leurs propres progrès.

Parier sur l'éducabilité de l'élève suppose de penser qu'il y a dans l'immense majorité des cas des réponses spécifiquement pédagogiques aux difficultés scolaires.

 

VI - Le modèle finlandais peut-il s'exporter ?

1 - Desserrer l'étau de l'évaluation autour des élèves.

2- Mettre beaucoup plus les élèves en activité.

3- Introduire plus de souplesse dans nos cursus et des possibilités de choix plus importantes pour nos élèves.

4- Favoriser des modes relationnels moins distants et cloisonnés, créer une atmosphère plus chaleureuse et confiante.

5- Faire de tous les enseignants des experts en pédagogie.

6- Concentrer les dépenses d'éducation sur ce qui est vraiment au service de l'élève : des taux d'encadrement élevés, des conditions matérielles optimales, faire des économies sur la vie scolaire, l'inspection et l'administration.

7- Eradiquer le redoublement.

8- Réduire la charge hebdomadaire de cours.

9- Permettre un haut degré de décentralisation, accorder une autonomie importante aux acteurs locaux.